Souffrir pour la justice : voilà une parole qui peut paraître lointaine, presque austère, dans un monde où l’on fuit la souffrance et où la justice elle-même semble parfois se diluer. Pourtant, pour le Père Maurice Carré, cette parole de l’abbé Michel Guérin garde une actualité brûlante. Elle ne parle pas d’un héroïsme lointain, mais d’un chemin de fidélité, d’un ajustement à Dieu dans la vie quotidienne — un travail intérieur qui fait parfois mal, mais qui conduit à la joie profonde de se savoir aimé et choisi.
Un Dieu de miséricorde, non de condamnation
« Peut-être que dans l’Ancien Testament, c’était un visage de Dieu un peu redoutable qui se dessinait à travers la foi des croyants de l’époque… Mais Jésus est venu nous annoncer un Dieu de miséricorde, un Dieu qui ouvre ses bras à toute personne qui vient vers Lui, quel que soit son itinéraire de vie. »
Le Père Maurice Carré rappelle que Jésus n’a jamais été rebuté par le côté sombre de la vie des hommes. Il n’a pas condamné, mais réveillé en chacun la vie endormie, blessée, parfois abîmée. Il a voulu que l’amour transforme tout.
Rendre justice à Dieu, c’est donc, pour le Père Carré, s’ajuster à Dieu :
« C’est faire en sorte que mes paroles, mes actes, mon comportement soient ajustés au Dieu que Jésus est venu nous révéler. »
La conversion : un travail de chaque jour
Cette recherche d’ajustement est le cœur même de la conversion.
« Se convertir, c’est se tourner résolument vers Dieu, se décentrer de soi-même pour se laisser remplir par Lui. Et cela demande un effort, parfois une certaine souffrance. »
Comme dans une relation d’amour où il faut sans cesse apprendre à s’ajuster à l’autre, s’ajuster à Dieu demande des renoncements, de petites morts à soi-même, mais toujours pour un amour plus grand. C’est une exigence douce mais réelle du disciple.
Témoigner d’un Dieu de pardon
Souffrir pour la justice, c’est aussi témoigner de Dieu — non pas d’un Dieu qui punit ou qui juge, mais d’un Dieu de pardon.
« Le pape François nous le rappelle souvent : Dieu ne se lasse jamais de pardonner ; c’est peut-être nous qui nous lassons de le lui demander. »
Le Père Carré y voit une invitation pour ce Carême :
« Comment puis-je mieux m’ajuster à Dieu ? Et comment oser témoigner, sans tapage ni prosélytisme, de la joie que donne la foi ? »
Persévérer dans la fidélité
Témoigner aujourd’hui, reconnaît-il, n’est pas toujours facile. Beaucoup se sentent isolés dans leur foi, parfois même au sein de leur famille. Cela peut susciter l’incompréhension, les critiques ou la mise à distance. Mais le Christ lui-même a connu cette solitude, et c’est là que se révèle le sens de la parole de l’abbé Guérin :
Souffrir pour la justice, c’est souffrir à cause de Dieu, pour les intérêts de la gloire de Dieu.
Souffrir pour la justice, ce n’est pas chercher la douleur : c’est choisir la fidélité à Dieu dans les situations où cette fidélité coûte quelque chose.
Un appel à la joie du témoignage
Le Père Maurice Carré conclut avec sérénité :
« Le Carême est ce temps où Dieu nous invite à nous laisser ajuster par Lui, à oser témoigner, même dans la discrétion, de la joie que la foi apporte. Car notre plus belle mission, c’est de montrer par notre vie qu’un Dieu de miséricorde continue d’aimer ce monde. »